Connaissez-vous le domaine universitaire du Sart Tilman ? On vous y emmène en ballade

Depuis les années 1960, l’implantation de l’université donne lieu à la création d’œuvres architecturales recherchant l’intégration à la nature.

Le hall d’accueil et la grande verrière du centre hospitalier, classés comme monument en 1994.
Le hall d’accueil et la grande verrière du centre hospitalier, classés comme monument en 1994. ©Marie Lambert ©SPW-AWAP

Par Florence Pirard / Photos Marie Lambert

Lorsqu’en 1959, l’Université de Liège décide de transférer l’essentiel de ses installations au Sart Tilman, elle cherche à résoudre plusieurs problèmes rencontrés par de nombreuses universités européennes : l’explosion des effectifs étudiants et la diversification des matières enseignées, qui se heurtent à un problème d’extension spatiale dans les villes. À l’époque, beaucoup d’entre elles optent pour l’exurbanisation, à la manière des campus américains.

Aujourd’hui, l’augmentation croissante du nombre d’étudiants et les préoccupations climatiques et de transport poussent l’ULiège à réinvestir peu à peu le centre-ville, et même à envisager de regrouper en ville toutes les facultés liées aux activités humaines (la faculté de philosophie et lettres était toujours restée place du XX-Août) et, au Sart Tilman, celles dirigées vers les sciences, les techniques et la santé.

L’environnement naturel. La protection du site naturel du Sart Tilman a commencé dès le début du XXe siècle, avec la volonté de préserver le massif forestier. Le plan directeur d’aménagement détermine des zones de gestion biologique, des zones naturelles, des espaces verts… Quatre sites méritent une attention particulière : les pelouses calaminaires au départ d’Angleur, la lande de Streupas accessible par la rue de la Belle Jardinière, le vallon du Blanc Gravier et le parc de Colonster. Ils témoignent de la diversité des milieux de ce vaste domaine périurbain, ouvert librement au public et qui offre quatre balades pédestres d’intérêt scientifique, paysager et didactique.

Architecture et urbanisme. En 1960, avant d’entamer les chantiers, l’université ordonne une série d’enquêtes approfondies (géomorphologie, géologie, hydrologie, botanique, climatologie, pollution et bruit). Plusieurs facteurs peuvent décider de l’implantation d’un ensemble de bâtiments dans une aire déterminée.

La faculté des sciences est placée au centre du domaine, car elle occupe les surfaces les plus importantes et est destinée à recevoir le plus grand nombre d’étudiants. Le centre hospitalier est installé sur le versant sud, qui descend vers l’Ourthe, afin de profiter d’un ensoleillement maximal et de l’éloignement des émanations des industries de la vallée de la Meuse. C’est également pour éviter tout risque de pollution que la chaufferie centrale a été implantée à l’extrémité nord. Quant aux logements pour étudiants, leur vocation sociale impliquait tout naturellement un emplacement proche du village du Sart Tilman.

Le centre hospitalier universitaire. Conçu par l’architecte Charles Vandenhove, il est occupé à partir de 1976. Il s’agit d’un vaste ensemble se déployant en étoile autour d’un hall d’accueil abrité sous une grande verrière. Classé comme monument en 1994, ce vaste volume de verre lumineux est le cœur de l’ensemble. Il est surmonté de toits en pente en cascade, soutenus par des colonnes métalliques rondes. Une grande cour intérieure pavée précède cette entrée et mène également aux auditoires de médecine. Les cinq tours puissantes qui complètent l’ensemble, autonomes et polyvalentes, sont toutes reliées à l’espace central par un volume de transports verticaux. Les chambres bénéficient d’une situation privilégiée, ouverte vers l’extérieur, le paysage, la lumière et le soleil.

Le restaurant (B8). D’une conception originale, l’édifice se compose de quatre pavillons aux angles coupés, accolés à un carré central. Il présente des volumes marqués, percés de longues ouvertures étroites. L’emploi de béton, caractéristique des premiers bâtiments du Sart Tilman, répond à la volonté d’harmoniser l’ensemble. À la symétrie extérieure s’oppose un rez-de-chaussée sinueux, presque labyrinthique. L’étage intermédiaire, inaccessible au public, est à vocation logistique. Enfin, le dernier niveau comporte une vaste cuisine centrale autour de laquelle s’articulent quatre salles de 90 places, accessibles par autant d’escaliers partant du rez-de-chaussée. Véritable belvédère, il offre une vue imprenable sur les horizons boisés. Une salle de spectacle de trois cents places complète les équipements. L’implantation tire pleinement parti de la forte déclivité du terrain : l’architecte, André Jacqmain, a su habilement exploiter cette particularité en jouant sur les différents niveaux, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Ainsi, l’allure du restaurant varie selon l’angle de vue. Son architecture forte lui donne un rôle de repère visuel et en fait l’un des bâtiments emblématiques de l’Université de Liège au Sart Tilman.

Le restaurant (B8).
Le restaurant (B8). ©Marie Lambert ©SPW-AWAP

Les homes des étudiants (B13). Implantés à proximité du village du Sart Tilman en 1967, de manière à articuler l’entrée du campus avec la zone d’accès à la ville, ils se composent d’un bloc central bas, comportant les services collectifs (cafétéria, salle de jeu, salon de lecture, espaces d’activités sportives et culturelles), auquel se joignent, par le biais de galeries, trois ensembles d’habitations, que l’architecte définit comme «une ruche périphérique dont le vide central est occupé par les volées croisées d’un escalier double». Adoptant un plan cruciforme sur quatre niveaux, ils comportent quatre appartements par étage. La structure portante des homes a été réalisée en béton armé coulé sur place. La façade et les volumes intérieurs laissent également la part belle à ce matériau, dont la plastique est remarquablement exploitée par l’architecte André Jacqmain.

Sart Tilman : Le home des étudiants.
Le home des étudiants. ©marie Lambert ©SPW-AWAP

L’institut de physique (B5). Concomitamment à la réalisation des grands amphithéâtres dont il est également l’auteur, Pierre Humblet conçoit, en 1967, le bâtiment dédié aux licences-recherches de physique, dans une écriture austère où le béton exprime pleinement sa matérialité. Les bureaux bénéficient de lumière naturelle, tandis qu’au centre, les espaces confinés sont réservés aux chambres noires climatisées.

Sart Tilman : L'institut de physique.
L'institut de physique. ©Marie Lambert ©SPW-AWAP

L’institut de chimie (B6). Édifiée dans le prolongement des instituts scientifiques par Claude Strebelle en 1977 et 1979, l’extension de chimie est un vaste complexe dont la réalisation s’est faite en deux temps. La phase A comprenait la construction d’un abri d’autobus prolongé par une conciergerie, d’un local de déchets toxiques et d’un ensemble de laboratoires et de bureaux. La phase B portait sur l’édification, d’une part, d’un bâtiment destiné à accueillir la bibliothèque de chimie-physique et, d’autre part, de petits amphithéâtres dénommés «galerie des Arts». L’ensemble illustre une franche évolution des conceptions architecturales et marque le début d’une nouvelle ère au domaine du Sart Tilman : au modernisme radical des premières années succède une architecture organique, teintée d’humanisme. Les volumes se morcellent, les interventions artistiques se multiplient, et Claude Strebelle, jusque-là resté en dehors de la création, intervient en tant qu’auteur du projet.

Sart Tilman : L'institut de chimie.
L'institut de chimie. ©Marie Lambert ©SPW-AWAP

Le trifacultaire (B33). L’édification en 1994-1995 du bâtiment trifacultaire intervient dans un contexte particulier pour l’université. En 1989, la décision du maintien du rectorat au centre-ville libère l’espace réservé à cet effet au Sart Tilman alors que les facultés voisines (droit, psychologie, économie) réclament des extensions urgentes. L’emplacement sur le côté nord de la place est stratégique : il domine l’espace où convergent trois facultés et le referme. Le bureau Greisch remporte l’appel d’offres. Reprenant certaines caractéristiques du projet du professeur Jean Englebert, le bâtiment offre une architecture fonctionnelle tout en sobriété. Il se présente comme un long volume parallélépipédique dont les façades sont entièrement recouvertes de zinc-cuivre-titane. Outre un très faible coût au mètre carré, l’édifice se veut économique à l’entretien et reflète ainsi les nouvelles préoccupations des autorités universitaires.

LE MUSEE EN PLEIN AIR

La volonté de créer au Sart Tilman un musée en plein air naît avec les premiers projets d’urbanisation du site. En 1961 déjà, l’architecte André Jacqmain en formule l’idée et, à partir de 1965, Claude Strebelle n’aura de cesse de favoriser la collaboration entre architectes et plasticiens. Il travaille ainsi lui-même avec Pierre Culot pour réaliser, devant les grands amphithéâtres, un «Mur de pierre d’âge viséen» inauguré en 1967, conjointement aux premiers bâtiments du nouveau campus. Plusieurs sculptures comme «Le Grand Aigle des conquêtes» de Francis André, «La Vie des abeilles» de Jean-Paul Laenen ou «Composition monumentale» de Léon Wuidar furent installées avant même la création du musée en plein air.

Les collections du musée comptent aussi des œuvres qui n’ont pas été spécifiquement conçues en fonction du site. C’est le cas de «Souvenir» et de «L’Aigle» d’André Willequet, de «Relâche» de Paul Machiels, de «Niobé» et de «La Caille» de George Grard, du «Pâtre» d’Idel Ianchelevici, de «L’Endormie n° 5» d’Olivier Strebelle et de bien d’autres. Une des intégrations les plus réussies est celle de la «Jeune Fille agenouillée» de Charles Leplae à proximité de la mare aux Chevreuils. La tendresse et l’intimité du dialogue que cette gracieuse image de femme établit avec la nature en font une des pièces les plus séduisantes de la collection.

Sart Tilman : . « Le Pâtre », œuvre d’Idel Ianchelevici, 1956.
« Le Pâtre », œuvre d’Idel Ianchelevici, 1956. ©Marie Lambert ©SPW-AWAP

ORGANISEZ VOTRE VISITE DU MUSEE

Accueil (permanence le mercredi de 9 h à 12 h, ou sur rendez-vous) : rond-point Simone David-Constant (bât. B1), 4000 Liège.

Renseignements et visites guidées : +32 (0)43 66 21 09 ou musee.pleinair@ulg.ac.be

1. Le hall d’accueil et la grande verrière du centre hospitalier, classés comme monument en 1994. 2. Le restaurant (B8). 3. Le home des étudiants (B13). 4. L’institut de physique (B5). 5. L’institut de chimie (B6). 6. «La Vie des abeilles», œuvre de Jean-Paul Laenen, 1969. 7. «Le Pâtre», œuvre d’Idel Ianchelevici, 1956.

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