Un trésor de Wallonie : Louvain-La-Neuve et son architecture du 20e siècle
Depuis la fondation de Charleroi en 1666, Louvain-la-Neuve est la seule ville nouvelle créée en Belgique.
- Publié le 18-03-2023 à 13h45
- Mis à jour le 18-03-2023 à 13h55
:focal(620x362.5:630x352.5)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/33NN2KD3ABEG7JGWM5CZN4WPSM.jpg)
Par Florence Pirard / Photos Guy Focant et Vincent Rocher
Louvain-la-Neuve fait partie de la commune belge d’Ottignies–Louvain-la-Neuve, située dans la province du Brabant wallon. Cette ville nouvelle, une des plus jeunes d’Europe, fut construite au début des années1970 à la suite de « l’affaire » de Louvain et de la scission de l’université en une partie néerlandophone, restée à Louvain (Leuven), et une partie francophone, installée en Wallonie. Le plateau de Lauzelle, creusé par la Malaise et cerné au nord par le bois du même nom, fut choisi comme site pour l’accueillir. Il n’était alors occupé que par quelques habitations et deux importantes fermes, celles de Lauzelle et du Biéreau.

À partir de 1970, les premiers jalons du centre-ville piétonnier se mettent en place avec l’aménagement des places du Levant, Sainte-Barbe et Galilée. Se dessinent ensuite la place et la rue des Wallons, vers 1973, qui constitueront un des axes principaux du centre. À l’instar des anciennes villes italiennes, les bâtiments aux fonctions importantes s’érigent en symboles qui donneront autant de repères monumentaux: la place des Sciences, édifiée vers 1970-1975, les halles universitaires et la gare qui sortent de terre à la même période, ou encore la faculté de théologie, trônant sur la Grand-Place depuis 1976. Ces édifices se signalent par leurs dimensions et la mise en œuvre audacieuse du béton qui tranche avec l’utilisation dominante de la brique, généralisée pour le reste de la trame bâtie. La seconde moitié des années1970 voit arriver la construction de tours de sept à huit niveaux pour accueillir des logements étudiants. En 1980, l’installation de toutes les facultés s’achève. Restait à bâtir une église, qui verra finalement le jour en 1984.

De plus en plus de particuliers veulent s'installer à Louvain-la-Neuve. La population étudiante devient progressivement équivalente à celle des résidents actifs. Le flanc sud du lac va voir naître des projets immobiliers dès 1987. Un projet urbain est relancé dans les années1990 pour s'adapter à l'accroissement continu du nombre d'habitants non étudiants et répondre aux besoins d'une véritable ville: création du centre commercial L'Esplanade et de ses parkings, mise en place d'un nouvel axe piéton, la rue Charlemagne, etc. Le XXIesiècle est marqué par l'érection d'un complexe de cinémas et de l'Aula Magna, qui viennent clore la Grand-Place.
Le musée L. La place des Sciences et la place Galilée, dessinées entre 1970 et 1975 par André Jacqmain (1902-1994), symbolisent à elles seules la ville nouvelle. La première est installée en contrebas des bâtiments qui la cernent. L'utilisation, tant pour les éléments portants que pour les luminaires, de voiles en béton armé coulés sur place permet une réalisation rapide de l'ensemble. De plus, cette technique autorise un jeu subtil de la courbe et de la ligne droite, dont le rendu sculptural ne laisse personne indifférent. Le point fort de ce geste urbanistique est la bibliothèque des sciences, aujourd'hui musée L. Elle se différencie du reste par sa taille et sa volumétrie particulière. Il s'agit ici véritablement d'une œuvre en soi, avec sa façade principale organisée autour de différentes terrasses en escaliers. Totalement novatrice en son temps, elle reste aujourd'hui l'insigne de la ville, sa carte de visite intemporelle.
Le musée du département d’archéologie et d’histoire de l’art de l’université est ouvert au public en 1979, lors de l’installation de la faculté de philosophie et lettres à Louvain-la-Neuve. Avec celle-ci s’achève le déménagement de l’UCL. Installé dans le collège Érasme jusqu’en 2015, le musée n’est pas seulement un laboratoire pour les étudiants en histoire de l’art, il est aussi le Musée du dialogue. Cette idée est mise en œuvre par une muséographie dont le principe est de faire dialoguer entre elles des œuvres d’époques et de zones géographiques différentes et, d’autre part, par un dialogue entre le musée et la ville.
Rapidement, le manque d’espace se fait sentir et les rêves d’un nouvel établissement ne vont pas manquer. C’est à l’automne2017 que, rebaptisé musée L –pour musée universitaire de Louvain–, il s’installe dans l’ancienne bibliothèque des sciences, entièrement transformée et rénovée. C’est le tout premier musée universitaire de Belgique de grande envergure. Avec près de 32 000pièces, pour beaucoup issues de donations privées, les collections sont composées d’œuvres d’art de toutes les cultures et de toutes les époques, de spécimens d’histoire naturelle, d’objets archéologiques et ethnographiques ou encore de machines et inventions à vocation scientifique. Le principe du dialogue est maintenu.
Le musée L, c’est, sur six étages, plus de 3 800m² accessibles au grand public, dont des espaces d’exposition pour les collections permanentes et les expos temporaires, ainsi que des espaces d’animation et d’accueil, mais aussi un centre de documentation, des bureaux, des ateliers et des réserves. Il prend place également dans un projet plus large de revitalisation urbaine du quartier alentour. Les bâtiments qui font la jonction avec la place Galilée accueillent la bibliothèque publique de Louvain-la-Neuve et la médiathèque, rénovée en 2014 et aujourd’hui appelée Point Culture. Au-delà des collections (musique, cinéma et documentaire), celle-ci propose des espaces de rencontre, d’exposition et de création ouverts à toutes les disciplines artistiques.
Lire aussi >La Hulpe : la pépite du Brabant wallon

Les halles universitaires. Comme pour toute ville qui se respecte, une position stratégique devait y être réservée à l'accès ferroviaire. La gare est intimement liée à la vie facultaire puisqu'elle s'imbrique au bâtiment des halles universitaires, sis à l'angle de la rue des Wallons et de la place de l'Université, en plein cœur de la ville. C'est à Yves Lepère qu'on doit la construction de ce vaste complexe, en 1975. Il abrite non seulement les guichets de la gare – où les voies pénètrent par le sous-sol – mais aussi une galerie commerçante et l'office du tourisme au rez-de-chaussée, ainsi que le rectorat et l'administration de l'université aux étages. Ce bâtiment est singulier à plus d'un titre, avec sa tribune, ses hautes arcades qui dominent l'espace public et sa façade quadrillée de baies à encadrement de béton. Son extrémité méridionale est rehaussée depuis 1987 par une fresque de l'artiste Roger Somville (1923-2014) et du Collectif d'art public dont le titre est « Qu'est-ce qu'un intellectuel ? » L'œuvre s'étend sur deux hauts murs de béton des halles universitaires. Cette peinture à l'acrylique, aux couleurs éclatantes, questionne le statut de l'intellectuel en proposant une sorte de généalogie du penseur, de l'Antiquité à aujourd'hui en passant par la Renaissance.
Le cyclotron. Les premières constructions apparaissent peu avant 1970, à l'écart de la future ville, pour y établir le cyclotron et les facultés des sciences mathématiques et physiques. Cet ensemble d'immeubles de béton et de verre, dû à l'architecte Roger Bastin (1913-1986), n'était pas encore soumis aux prescriptions urbanistiques et architecturales qui s'imposeront ensuite pour l'ensemble de la ville.
Le bâtiment Stevin sur la Grand-Place. Au nord, la place est fermée par le bâtiment Réaumur, un volume simple de trois niveaux sous toiture plate dû à André Constant. Des bandeaux de béton quadrillent la façade en laissant place à des baies de forme et de taille variées. L'immeuble est connecté par une passerelle au bâtiment Stevin, dessiné par Pierre Humblet, qui utilise de nouveau la brique, le béton et les toitures plates. Des pilastres de briques monumentaux barrent les façades verticalement et encadrent des fenêtres.

L'église Saint-François d'Assise. Si elle est aujourd'hui un symbole fort de la ville de Louvain-la-Neuve, elle ne s'est imposée que tardivement. Créer un tout nouveau temple au cœur d'une ville nouvelle et dans le sillage des événements de mai 68 relevait d'un véritable défi. À cette tâche épineuse s'ajoutait la réflexion en cours sur la place de l'Église dans une société en pleine mutation et les prescriptions architecturales émanant de la nouvelle liturgie proposée à l'issue du concile VaticanII (Rome,1962-1964). Voilà pourquoi ce n'est qu'en 1984 que l'église fut construite, selon les plans de Jean Cosse. Elle est érigée à l'extrémité est du quartier de l'Hocaille et fait face aux nouvelles constructions qui s'élèvent petit à petit pour rejoindre l'Aula Magna et la place Raymond Lemaire. Le sanctuaire devait aussi rencontrer une autre exigence, celle de s'adapter à un nombre de fidèles pouvant fluctuer d'une poignée à plus de 1 500personnes en fonction de l'implication ou non de l'université dans un office. En guise de réponse à toutes ces contraintes, Jean Cosse opta pour une déclinaison du triangle – symbole fort dans l'histoire chrétienne – comme fil conducteur de ses dessins. Les volumes furent bâtis en brique claire et en béton. Signes et références s'y multiplient sur les linteaux et lieux de passage: alpha et oméga, monogramme du Christ… Le triangle est partout et la lumière investit l'espace par le haut. Les briques sont cernées par un joint clair qui rappelle l'importance de l'individu au sein d'une communauté et, enfin, la forme du campanile évoque des mains tendues vers le ciel.
Lire aussi >21 promenades en boucle dans le Brabant Wallon
- Le musée Hergé

Le musée est consacré au célèbre auteur belge de bandes dessinées, créateur notamment des aventures de Tintin, Quick et Flupke et Jo, Zette et Jocko. Ce bâtiment de 3 600m², dessiné par l’architecte français Christian dePortzamparc, a ouvert ses portes en 2009. Le musée comporte huit salles d’exposition permanente, une salle pour les expositions temporaires, une muséographie interactive, une reconstitution du studio de création et plus de 80planches originales, 800photos et des documents inédits.
INFOS
Le musée est accessible tous les jours
de 10 h 30 à 17 h 30, sauf les lundis.
De nombreuses animations et visites spécifiques sont proposées pour tous
les publics.
Musée Hergé
Rue du Labrador26
1348 Louvain-la-Neuve
+32 (0)10 488 421
Pour en savoir plus
L'Agence wallonne du patrimoine a édité un Carnet consacré au patrimoine de Louvain-la-Neuve. Si vous souhaitez acquérir cette publication, n'hésitez pas à contacter le 081 23 07 03 ou publication@awap.be ou consultez sur le site de vente en ligne de l'Agence wallonne du patrimoine (promotion.awap.be). Le Carnet est également en vente dans de nombreuses librairies et à la boutique de l'Archéoforum de Liège. Si vous commandez le Carnet no152, « Le Patrimoine d'Ottignies–Louvain-la-Neuve », auprès de l'Agence wallonne du Patrimoine avant le 28avril 2023, vous pourrez bénéficier d'une remise de 50% sur le Carnet no93, « Le Patrimoine de Perwez », soit 9euros pour les deux Carnets + les frais de port (offre valable jusqu'à épuisement du stock). N'hésitez pas à profiter de cette opportunité, avec le code « promo Brabant wallon ».
« Le Patrimoine d'Ottignies–Louvain-la-Neuve », Carnet du patrimoine no152, Institut du patrimoine wallon, 2017, 56p., 6euros.
« Le Patrimoine de Perwez », Carnet du patrimoine no93, Institut du patrimoine wallon, 2012, 56p., 6euros.
Le musée L
Jusqu’au 26mars 2023, vous pouvez y découvrir l’exposition « Fossiles & Fictions ». Que nous révèlent ces traces du passé profond du monde vivant ? Quelle place occupons-nous dans notre écosystème fragile ? Quelle empreinte laisserons-nous de nos civilisations, de nos déchets, de nos technologies ? À partir de la collection de paléontologie des vertébrés de l’UCLouvain, l’exposition vous emmène dans un passionnant voyage entre les origines de la vie et son devenir.
INFOS
Le musée L est ouvert du mardi au vendredi de 9 h 30 à 17 h, le week-end et les jours fériés de 11 h à 17 h. Il est fermé les lundis ainsi que le 21juillet, le 15août, le 25décembre et le 1erjanvier. Le troisième jeudi du mois, une nocturne permet d'y accéder jusqu'à 22 h. Des visites sont organisées pour le visiteur individuel, les familles, les groupes d'adultes, les groupes scolaires et les personnes à besoins spécifiques.
Musée L
Place des Sciences3 à 1348 Louvain-la-Neuve
+32 (0)10 47 48 41 – info@museel.be
Organisez votre visite
La ville de Louvain-la-Neuve est une destination de choix pour une journée ou un week-end de découvertes patrimoniales, culturelles et naturelles. L’office du tourisme propose de multiples promenades et des visites pour découvrir la ville.
INFOS
Office du tourisme de Louvain-la-Neuve
Galerie des Halles, place de l’Université1 1348 Louvain-la-Neuve
+32 (0)10 47 47 47 – info@tourisme-olln.be