Réseaux sociaux : une étude pointe le risque d'isolement chez les jeunes adultes

Passer trop de tempssur les réseaux sociauximplique le risque de se sentir plus seul. Même si le constat n’est pas nouveau, une étudeofficialiseles conséquences préoccupantes d’une utilisation excessive des réseaux.

Josephine Christiaens
Les gens qui utilisent les réseaux sociaux plus de deux heures par jour ont deux fois plus de risques de se sentir isolées par rapport à ceux qui n’y consacrent pas plus d’une demi-heure au quotidien.
Les gens qui utilisent les réseaux sociaux plus de deux heures par jour ont deux fois plus de risques de se sentir isolées par rapport à ceux qui n’y consacrent pas plus d’une demi-heure au quotidien.

Comble du paradoxe : les réseaux sociaux vous coupent du monde. La logique aurait supposé l’inverse et pourtant. Traîner sur Facebook, chatter sur Snapchat ou envoyer des selfies sur Instagramexacerbe le sentiment de solitude.

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C'est le bilan d'une étude publiée pardes chercheurs de la faculté de médecine de Pittsburgh, aux États-Unis. Le rapport pointe non seulement les risques d'isolement liés à une utilisation à outrance des réseaux sociaux, mais avertit aussi leur cible principale : les jeunes adultes. Plusces derniers consacreront de temps aux réseaux sociaux, plusils ressentiront le poids de la solitude. Pire, la fréquence des connexions seraitproportionnellement liée à ce sentiment négatif.

Non, les réseaux ne sociabilisent pas

Publiés dans la revue «American Journal of Preventive Medicine«, les résultats de cette recherche démontent l'idée générale qui penseque pour échapper à la solitude, mieux vautêtre connecté. Faux.Les réseaux sociaux sont loins d'être un remède à l'isolement, que du contraire. «Nous sommes des êtres sociaux mais la vie moderne à tendance à nous compartimenter au lieu de nous réunir. Bien que les réseaux sociaux semblent, à première vue, offrir des opportunités pour combler un vide social, je pense que cette étude montre qu'ils ne sont pas la solution que les gens espèrent», affirmele professeurBrian Primack, enseignant en médecine et auteur principal de l'étude.

UPMC, University of Pittsburg Medical Center
UPMC, University of Pittsburg Medical Center

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Le phénomène de l'isolement intéresse déjà depuis plusieursannées la communauté scientifique. Selon le Pr Primackqui déplore le«niveau épidémique des problèmes de santé mentale et d'isolement chez les jeunes adultes», la problématique est urgente à traiter. En 2014, une première étude publiée par les mêmes chercheurs révélait queles personnes qui utilisaient le plus les réseaux sociaux avaient une faible estime d'eux-même. En interrogeant près de 2000 Américainsâgés de 19 à 32 ans et leur fréquence de connexion sur les réseaux les plus populaires (Facebook, YouTube, Twitter, Google Plus, Instagram, Snapchat, Reddit, Tumblr, Pinterest, Vinet et LinkedIn), l'étude a permis de démontrer qu'en dépassant les deux heures d'utilisation par jour, lesrisques de se sentir isolé doublaient.

Seul donc connecté ?

Les résultats de la recherche préconisaient ainsi une fréquence d'utilisation d'une demie-heure par jour. «Les participants qui enregistraient plus de 58 connexions hebdomadaires voyaient même ce sentiment tripler en comparaison avec ceux qui se limitaient à 9 visites par semaine», rapportent les auteurs.

Quant à savoir si le sentiment de solitude préexiste à l’utilisation des réseaux sociaux, les chercheurs s’interrogent encore. Passer un temps excessif sur les réseaux ne résulterait-il pas d’une solitude déjà présente au départ ? C’est la question que poseElizabeth Miller, professeur de pédiatrie et coauteure de l’étude, sans avoird’explication définie :

guillement

Il est possible que les jeunes qui se sentaient déjà seuls se sont tournés vers les réseaux sociaux. Ou alors, c'est l'usage répété de ces plateformes virtuelles qui peut avoir entraîné une sorte de rupture du monde réel, contribuant ainsi à un sentiment d'isolement. Cela peut également être une combinaison de ces deux phénomènes.

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Une chose est demeurecertaine : même si l’on se sent déjà seul, fréquenter les réseaux sociaux n’atténuera rien.

De l’importance du regard des autres

En pleine logique inversée, difficile de comprendre ce qui nous isole de ce qui nous sociabilise. Pour expliquer ce paradoxe, les chercheursproposent plusieurs théories. Selon eux, trois facteurs sont responsables du sentiment de solitude.

Flickr : Cam Miller
Flickr : Cam Miller

D'abord le temps passé derrière l'écran qui nous absorbe et nous coupe de la «vraie» vie. Ensuite, l'apparition de sentiments négatifs, «comme lorsqu'une personne voit une photo de ses amis en train de faire la fête à une soirée où elle n'était elle-même pas invitée», explique les auteurs de l'étude. Enfin les réseaux sociaux sont la porte ouverte à d'autres sentiments tout aussi négatifs (complexe d'infériorité, honte, repli sur soi) devant le reflet de la vie des autreset latentation commune de donner lameilleure image de soi possible. Culte de l'apparence et idéalisation de soi, importance du regard des autres, etc. : autant de facteurs qui peuvent générer le malaise et la confusion.

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Une réalité tempérée par le Pr Primack qui «ne doute pas que certaines personnes peuvent effectivement trouver du réconfort et combler leurs besoins de sociabilité en entretenant des relations via ces réseaux» mais qui rappelle les risques d'isolement accru démontrés par la science.

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