Daniel Prévost : "Ce livre est là pour régler des comptes et faire le bilan"
Après plusieurs ouvrages variés, Daniel Prévost revient en librairie avec l’irrésistible Autobiographie de moi par moi. Une façon d’être dans le vrai ? « Mais aussi dans le faux. Personne n’a été aussi faux que moi », ironise-t-il. « Le livre est un véritable état des lieux, avec des anecdotes sur ceux qui ont été bienveillants et d’autres moins»
- Publié le 08-07-2022 à 15h13
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Par Christian Marchand
Paris Match. Vous êtes depuis toujours un électron libre. On le voit encore avec la sortie de votre dix-huitième livre. La liberté d'agir, c'est votre ADN ?
Oh oui ! Être un électron libre est une richesse, mais ce n'est pas donné à tout le monde. Dès vos débuts dans le métier, vous pouvez être enfermé dans un registre. Surtout chez nous, en France. Personnellement, me cantonner à une catégorie est impossible. Ça m'ennuie.
Que retenez-vous comme grandes étapes de votre vie ?
Enfant, j'ai eu un déclic : en 1952, j'ai vu « Jeux interdits » de René Clément, avec George Poujouly et Brigitte Fossey. J'étais avec ma grand-mère qui m'amenait au cinéma à Vincennes. Je me suis projeté dans l'histoire de ce petit garçon et de cette petite fille. Un autre film m'a également touché : « Le Garçon sauvage », de Jean Delannoy, avec Madeleine Robinson et Franck Villard. Je me suis un peu identifié à ces histoires. Mais ce n'est pas ce qui m'a construit.
Le chemin vous a semblé long et difficile ?
Oui et non, parce que j'avais deux grands copains : Jean Yanne et Michel Serrault. Je les ai connus lorsque je suis sorti du centre d'art dramatique où j'étais élève. J'avais été choisi pour jouer dans une pièce d'un auteur très connu à l'époque. Jean Yanne et Michel Serrault ont été de belles rencontres, positives. D'autres peuvent être malheureuses. Mon pilier fut ma directrice d'école, une dame adorable. Je devais avoir 9 ans. Elle m'a orienté et protégé jusqu'à la fin de sa vie.
Quel regard avez-vous sur l'époque actuelle ?
Personnellement, je ne suis pas mélancolique ou nostalgique. Je suis un enfant de la République. J'ai été élevé et éduqué dans la tradition de la République française. J'ai des principes naturels. C'est tout. Je vais passer et laisser la place aux autres. Et ceux-ci vont construire leur époque. Je ne veux surtout pas donner de leçons de quoi que ce soit.

Vous avez joué dans plus de cent films et séries, et gagné un César du meilleur second rôle grâce au « Dîner de cons » et à votre personnage de Lucien Cheval, ce contrôleur du fisc antipathique et procédurier. Vous avez souvent endossé des rôles de comique et incarné des faux méchants et des faux-culs.
J'ai dû attendre un certain temps avant de pénétrer dans cet univers du cinéma. Par la suite, je m'en fichais un peu. On me proposait des rôles et je jouais. Notre métier est une profession de désir : si quelqu'un vous veut, il vous prendra. Il faut aussi avoir la chance de trouver le personnage qui vous collera à la peau.
Le cinéma vous fait encore vibrer ?
Des films resteront. Récemment, j'ai vu et revu « L'Armée des ombres », de Jean-Pierre Melville. Je pense aussi à ce que disait Gabin : « Pour faire un bon film, il faut trois choses : une bonne histoire, une bonne histoire et une bonne histoire. » Je suis resté sur cette idée.
Vous avez 82 ans et toujours le regard rieur et le sens de la répartie. Vous avez l'angoisse du temps qui passe ?
Pas du tout. Je n'ai ni anxiété, ni angoisse. Et encore moins de regrets. Je poursuis ma vie en écrivant mes livres et en jouant des personnages comme dernièrement dans « Maison de retraite ». On m'aime ou pas, je n'en ai rien à penser.
Quel souvenir gardez-vous de la Belgique ?
Des images de franche rigolade et d'amitié. Je me souviens de ma première visite au pays. J'ai donné un spectacle dans une abbaye proche de Bruxelles. Je pense aussi à une dame très gentille, Claudine Rinchard. Elle venait à Paris faire son shopping pour une émission qui se tournait en public dans les studios de Charleroi. C'était « Zygomaticorama ». Ce côté public provincial donnait vraiment une belle et chaleureuse ambiance. Sans oublier Bernard Faure et ses caméras cachées. C'était à hurler de rire ! Après, il y a eu François Damiens, avec qui j'ai eu le bonheur de tourner « Adieu Paris », de mon ami Édouard Baer.
Et Sim ?
C'était un très bon ami. On a beaucoup travaillé ensemble. Il était irrésistible. Sur le tournage de « Sacré gendarme », dans le sud de la France à Flassan, avec mon pote Jacques Balutin, il faisait des blagues habillé en gendarme. Il arrêtait des voitures avec son sifflet. Le conducteur baissait sa vitre. À ce moment-là, Sim disait : « Bonjour Monsieur, contrôle des oreilles ! » On se marrait. Je pense aussi à Noël Godin et à un gars irrésistible, Renaud Rutten. J'étais avec lui au Festival du film de comédie à Liège.
Votre plat belge préféré ?
Le waterzooi. C'est bon, ça !
Et votre péché mignon ?
La bière, mais je n'ai jamais exagéré. Et puis votre chocolat ! J'en ai ramené des kilos en France pour ma femme et mes enfants.
