Le Dico des injures : "Les gens sont fainéants, la palette des insultes est bien plus large..."

Gros mots, noms d’oiseaux, insultes, injures, jurons… C’est un dictionnaire particulier, croustillant et complet qu’a concocté le Belge Christophe Godfroid aux éditions Kennes. Ces expressions qui font réellement partie de notre quotidien démarre le plus souvent d’un simple réflexe. Enflure, pouffiasse, gugusse, putain de ta race… C’est le moment pour se lâcher tout en gardant certaines limites !

Un dico à découvrir et à feuilleter pour apprendre sans avoir à rougir !
Un dico à découvrir et à feuilleter pour apprendre sans avoir à rougir !

Par Laurent Depré

Laissez Le Dico des injures trôner sur votre table de salon et vous pouvez être certain que quelqu'un, invité ou famille, s'en emparera par curiosité et par envie d'en apprendre plus sur ces mots parfois venus tout droit de l'antiquité. «Les gens doivent feuilleter ce dictionnaire soit en cherchant un mot spécifique soit en se laissant guider au hasard. Le ton général est humoristique mais derrière j'essaye d'expliquer aussi l'étymologie des mots et l'évolution du sens au cours des siècles. Ainsi, le mot «con» au Moyen-Âge définissait exclusivement le sexe féminin. Il a ensuite glissé vers la notion de bêtise avec ce côté uniquement masculin»nous raconte en préambule cet ancien fonctionnaire.

Christophe Godfroid est Belge et a travaillé au ministère de la justice avant de devoir prendre ce qu’on apelle un «congé forcé». C’est à ce moment-là que l’envie d’écrire sur ce sujets’est emparée de lui au travers de recherches lingusitiques historiques. Nous lui avons posé quelques questions sur ce dictionnaire très particulier, bordel !

Parismatch.be. Votre dictionnaire commence par «Abruti» et fini par «Zozo» : la langue française est-elle plus riche que d'autres en matière d'insultes et d'injures ?

Christophe Godfroid. «J'aurais tendance à répondre de façon affirmative car les synonymes sont assez nombreux en langue française. Prenons le simple exemple de con, abruti… Mais chaque langue à sa panoplie de termes injurieux, c'est certain. «

Le français de Belgique a-t-il des spécificités ?

«J'ai inclu une série de belgiscismes dans le dictionnaire comme «sukkeleir», «fourte» ou encore «clinche» qui sont plutôt bruxellois. Je n'ai pas oublié les insultes québecoises comme «colon» qui est la «version du beauf» québecois. Mon objectif était de donner un aperçu le plus complet des injures en français y compris des termes plus régionaux de l'hexagone mais aussi de Belgique et du Québec.»

Pourquoi les noms d'oiseaux et autres injures font-ils autant partie de notre quotidien ?

«Cela remonte au début de l'humanité… Qui dit société humaine dit forcément confits qui la plupart du temps génèrent des injures. On peut se trouver sur le volet privé, publique, professionnel ou amoureux également. Internet et les réseaux sociaux en sont bien entedu remplis aujourd'hui avec parfois des condamnations en justice à l'appui. Il ne faudrait pas oublier la galaxie des jurons qui eux ne s'adressent à personne en particulier. Il s'agit d'exclamations qui servent à se soulager ou à marquer l'étonnement voire la colère. «

On imagine qu'il y a des lieux ou des situations plus propices à l'injure ou aux jurons : un stade de football ou derrière son volant par exemple…

«Les automobilstes coincés dans les embouteillages sont certainement les champions (rires). Vous citez les stades de football et c'est absolument vrai. Mais attention car on tombe souvent alors dans l'injure raciste qui peut être punie et qui est ce qu'on appelle une insulte aggravée. Elle touche à la dignité humaine. Je précise que les insultes à caractère xénophobes ont été écartées de mon livre.»

Christophe Godfroid s’est beaucoup amusé à réaliser ce Dico des injures et cela se ressent. ©DR
Christophe Godfroid s’est beaucoup amusé à réaliser ce Dico des injures et cela se ressent. DR

Une journée sans jurons, c'est une journée ratée ?

«Les jurons sont spontanés ! Ils procurent un certain soulagement malgré leur côté injurieux voire blasphématoires. Beaucoup de jurons relèvent du réflexe et ne s'adressent à personne, si ce n'est à Dieu parfois…»

Découvrez-vous encore des injures malgré vos connaissances ?

«Je pense avoir été assez complet avec ce dictionnaire qui comprend quelques 530 entrées. Mais la langue évolue et j'ai intégré un certain nombre d'insultes modernes utilisées par le jeunes comme «schlag» (Ndlr : personne marginale et instable) ou «bolos» (Ndlr: synonyme de bouffon). A côté de cela, il y a des expressions beaucoup plus désuettes, d'origine médiévales tels que «gourgandine», «niquedouille». Des insultes un peu oubliées mais qui ne demandent qu'à revenir au premier plan. Il existe une très large palette d'insultes et de jurons : les gens sont souvent fainéants et utilisent finalement toujours les mêmes. Il faut varier les plaisirs (rires).»

C'est quoi votre insulte préférée et pourquoi ?

«C'est une insulte latine qui est «In cruce figaris«, va te faire crucifier ! Je trouve cette insulte qui nous vient réellement de l'Antiquité assez drôle. Il en existe beaucoup qui réchappent des mondes latin et grec. Si j'avais voulu prendre cette direction, il m'aurait fallu trois volumes au minimum !»

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