Mobilité décarbonée : Vers l'électrification à grande échelle des voitures thermiques

Les voitures thermiques sont appelées à disparaître, mais les véhicules électriques sont chers. Pour permettre un accès plus grand à la mobilité décarbonée, une voie alternative se dessine : le « rétrofit », pensé de manière industrielle. Soit l’électrification à grande échelle des véhicules diesel et essence des particuliers.Dans ce chantier émergent de la transition écologique, la France a une longueur d’avance sur la Belgique.

Une Fiat 500 thermique transformée en véhicule électrique (son ancien moteur est à droite sur la photo). À moyen terme, Aymeric Libeau, le fondateur de la start-up Transition-One, ambitionne de proposer à ses clients l’électrification de 80 modèles.
Une Fiat 500 thermique transformée en véhicule électrique (son ancien moteur est à droite sur la photo). À moyen terme, Aymeric Libeau, le fondateur de la start-up Transition-One, ambitionne de proposer à ses clients l’électrification de 80 modèles.

Paris Match. Comment définiriez-vous le « rétrofit » ?

Aymeric Libeau, coprésident de la filière française du rétrofit, AIRe (Acteurs de l'industrie du rétrofit électrique) et fondateur de la start-up française Transition One. C'est l'opération qui consiste à transformer un véhicule polluant en un véhicule zéro émission. Tout ce qui roule avec du diesel ou de l'essence peut aussi fonctionner avec de l'électricité. Quand on rétrofite une voiture thermique, on remplace son moteur par un autre qui sera moins bruyant, moins vibrant et, surtout, qui sera respectueux de l'environnement et de la qualité de l'air. Certains acteurs du rétrofit se spécialisent dans la transformation de véhicules utilitaires, d'autres visent les camions ou les bus. D'autres encore transforment des véhicules anciens, des voitures de collection ou encore des deux-roues dans de petits ateliers, sur un mode artisanal. Transition one, la start-up que j'ai créée en 2018, alors que le rétrofit n'était pas encore réglementé en France, cible plutôt une gamme de véhicules du quotidien.

Autrement dit, vous visez les voitures de M. et de Mme Tout-le-Monde ?

Parfaitement. Nous ambitionnons de procéder au rétrofit d’un certain nombre de véhicules légers, ceux que les particuliers utilisent pour faire leurs courses ou aller au travail. Il s’agit de voitures qui, généralement, roulent peu : le conducteur européen fait en moyenne 30 km par jour. In fine, nous proposerons l’électrification de 80 modèles, mais nous commencerons par des Twingo, des Fiat 500, des Mini, des Renault Clio, des Kangoo et des VW Polo.

« Notre vision est de faire du rétrofit à grande échelle, c’est-à-dire dans toute l’Europe»

Il s’agit donc d’un projet industriel ?

Oui, notre vision est de faire du rétrofit à grande échelle, c’est-à-dire dans toute l’Europe. Car ces voitures thermiques légères représentent plus d’un quart des 260 millions de véhicules qui circulent sur notre continent. Vu leur nombre, elles pèsent en termes de rejet d’émissions à effet de serre.

Aymeric Libeau : « La transformation des voitures thermiques en voitures électriques n’est pas une fin en soi. L’objectif, le rêve qui motive cette entreprise de rétrofit industriel, c’est de pouvoir compter parmi les acteurs de la transition écologique.» ©Doc
Aymeric Libeau : « La transformation des voitures thermiques en voitures électriques n’est pas une fin en soi. L’objectif, le rêve qui motive cette entreprise de rétrofit industriel, c’est de pouvoir compter parmi les acteurs de la transition écologique.» ©Doc

Vous avez des objectifs chiffrés ?

En lien avec notre seul projet industriel, nous avons planifié l’électrification de quelque 10 millions de véhicules avant 2035. Mais il ne s’agit pas là de notre but premier.

Comment cela ?

La transformation des voitures thermiques en voitures électriques n’est pas une fin en soi. L’objectif, le rêve qui motive cette entreprise de rétrofit industriel, c’est de pouvoir compter parmi les acteurs de la transition écologique. Nous voulons avoir un impact mesurable sur l’environnement. Notre projet est d’épargner à notre atmosphère l’émission d’un million de tonnes de CO2 dans les dix prochaines années.

« Il faut multiplier les solutions de mobilité décarbonée dès aujourd’hui, afin qu’elles produisent leurs effets plus rapidement »

La décarbonation de la mobilité fait son chemin. Ne peut-on pas se contenter d’attendre la disparition programmée par l’Union européenne des véhicules thermiques ?

En juin de l’année dernière, l’UE a décrété que les véhicules thermiques neufs ne pourraient plus être vendus à partir de 2035. C’est dans plus de dix ans ! Et après cette date butoir, les dernières voitures thermiques en circulation auront encore une durée de vie de quelques années. Pourtant, l’urgence climatique, c’est maintenant. Il y a un manque d’ambition. Il faut multiplier les solutions de mobilité décarbonée dès aujourd’hui, afin qu’elles produisent leurs effets plus rapidement. Pensé de manière industrielle, le rétrofit est, à cet égard, une piste très prometteuse. Avec mes équipes, nous portons un projet sur lequel nous travaillons depuis presque cinq ans.

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Quel a été le déclic pour vous lancer dans cette entreprise ?

Pour tout vous dire, ce déclic a eu lieu dans l’après-midi du 6 juillet 2017…

C’est pour le moins précis !

Oui, parce que ce fut un moment marquant. Ce jour-là, avec quelques années d’avance sur l’UE, le ministre français du Climat, Nicolas Hulot, annonçait la fin programmée de la vente des voitures thermiques dans l’Hexagone, en évoquant l’horizon 2040. Je me suis alors demandé comment on opérerait concrètement cette transition vers une mobilité totalement décarbonée. À l’époque, l’automobile n’était pas mon secteur d’activité. J’avais entrepris jusque-là dans le numérique (la société de création de logiciels Pentalog, cofondée par Aymeric Libeau, emploie 1 500 personnes dans plusieurs pays, NDLR). Et j’ai eu rapidement l’intuition qu’il fallait chercher une solution disruptive à l’équation du renouvellement du parc automobile.

Vous voulez dire une stratégie inédite, hors des clous ?

Oui, une idée à contre-courant de la pensée commune. Et singulièrement à contre-courant de la manière de voir des constructeurs automobiles. Ceux-ci ont oublié la leçon donnée au début du XXe siècle par l’une de leurs icônes, Henry Ford. À cette époque, les voitures étaient fabriquées dans des ateliers où l’on pouvait les personnaliser selon les désirs de clients. Cela impliquait un prix de vente élevé et un marché réduit. Ford a complètement changé la donne en industrialisant la production de la Ford T, ce qui permettait de proposer une voiture certes très standardisée, mais à un prix hors concurrence. Il s’est ainsi ouvert un marché immense, tandis que la production artisanale s’est écroulée. Ensuite, pour tous les constructeurs, il est devenu évident que la production devait se faire à la chaîne.

« Cette rationalisation et le volume de production permettent de faire un rétrofit pour 7 000 ou 8 000 euros »

Quel est le rapport avec le rétrofit industriel ?

Aujourd’hui, on mise sur la production de voitures électriques neuves et la constitution progressive d’un marché de l’occasion pour décarboner le parc automobile. Les constructeurs sont restés dans un modèle Kleenex : ce qui a été utilisé finit par être jeté après usage. On donne d’ailleurs des primes en France pour que des voitures soient envoyées à la casse avant d’être remplacées par d’autres qui sont moins polluantes. Le problème, c’est que les nouveaux véhicules, et particulièrement les voitures électriques, sont très chers. Malgré les aides financières octroyées par le gouvernement français (rien de tel n’existe en Belgique, NDLR), ce marché reste inaccessible pour une grande partie de la population. D’ailleurs, les autorités françaises cherchent à mettre en place un leasing social permettant un plus grand accès des Français à la conduite électrique, mais il peine à trouver la bonne équation. Regardez où nous en sommes, un peu plus de cinq ans après la sortie du ministre Hulot. En prenant en compte les hybrides rechargeables, seulement 2,5 % du parc automobile français est constitué de voitures électriques. Si on se limite aux voitures full électriques, on tombe à 1,5 % des 40 millions de véhicules en circulation (en Belgique, la proportion est encore plus faible : en août 2022, selon Statbel, sur les 5 947 479 voitures particulières immatriculées, 71 651 étaient électriques, soit 1,2 %, NDLR). Comme on est partis, on ne sera pas sorti de l’ère thermique avant 2055 !

La disruption que vous proposez est donc de sortir de ce schéma ?

Oui, il s’agit de ne plus jeter les voitures thermiques déclassées, mais d’étendre leur durée de vie en les transformant en véhicules bas carbone. Et d’ainsi créer un troisième marché, celui du rétrofit industriel, qui sera accessible à un bien plus large public.

Aymeric Libeau : « Il s’agit de ne plus jeter les voitures thermiques déclassées, mais d’étendre leur durée de vie en les transformant en véhicules bas carbone. » ©Doc
Aymeric Libeau : « Il s’agit de ne plus jeter les voitures thermiques déclassées, mais d’étendre leur durée de vie en les transformant en véhicules bas carbone. » ©Doc

L’électrification d’un véhicule thermique léger est-elle moins coûteuse que la production d’un véhicule électrique neuf ?

Nettement ! Et plus encore si le rétrofit est pensé de manière industrielle. La matière première, les véhicules en fin de vie thermique, ne doit pas être fabriquée. On recycle, c’est de l’économie circulaire. En ciblant des architectures de véhicules similaires, on produit en série des unités de rétrofit, autrement dit des packs moteur-batteries qui conviennent à plusieurs modèles. Cette rationalisation et le volume de production permettent de faire un rétrofit pour 7 000 ou 8 000 euros. En France, les clients peuvent en outre bénéficier d’une aide gouvernementale de l’ordre de 3 000 euros, ce qui rend la conversion très attractive. Où trouverez-vous une voiture électrique, même d’occasion, pour 5 000 euros ? En termes d’impact social, il faut aussi souligner que cette nouvelle activité a pour vocation de créer et de maintenir des emplois locaux : il s’agira de créer des micro-usines au niveau régional pour produire les unités de rétrofit, lesquelles pourront être installées en quatre heures par une multitude de garagistes agréés. Ce sera donc une aubaine pour les indépendants dont le chiffre d’affaires est impacté négativement par le développement du véhicule électrique (il n’y a plus d’huile, de filtres à changer, les entretiens sont beaucoup plus légers, NDLR). Alors que tout cela ne deviendra concret que dans quelque temps, nous avons déjà 500 candidats installateurs en France, et 1 200 au niveau mondial.

Et les clients ? Vous avez le sentiment que la demande est là ?

Alors que le carnet de commandes n’est pas encore ouvert, nous avons déjà enregistré 13 000 demandes de futurs clients enthousiastes.

« D’une certaine manière, on est en train d’inventer la voiture éternelle »

Pourquoi ne pouvez-vous pas les satisfaire dès aujourd’hui ?

Pour des questions d’homologation, mais aussi d’investissements : commencer immédiatement à l’échelle industrielle implique une mise de départ de plusieurs dizaines de millions d’euros. Nous serons opérationnels en 2024.

N’y a-t-il pas, par exemple, des réticences relatives à la sécurité de ces « vieux » véhicules que vous voulez électrifier ?

Nous ne visons que des véhicules produits après l’an 2000, ceux dont le traitement anticorrosion permet d’envisager une durée de vie très importante du châssis. Ces voitures électrifiées pourront être régulièrement améliorées. D’une certaine manière, on est en train d’inventer la voiture éternelle. À tout le moins, ces véhicules, s’ils sont bien entretenus – c’est-à-dire à un prix d’entretien bien moins élevé que celui d’une thermique –, pourront encore rouler pendant des dizaines d’années.

Mais ne vont-ils pas paraître démodés ?

Au contraire, ces voitures bas carbone deviendront « vintage ». Elles seront sans doute très tendance. Pensez à une 205 d’il y a quarante ans : si vous la receviez dans son jus, vous n’auriez peut-être pas l’envie de la conduire. En revanche, si vous l’imaginez avec un moteur électrique, une planche de bord digitale, l’ESP et d’autres mises à jour, elle vous paraîtra bien plus attractive. Il faut imaginer que les Fiat 500 et autres Clio qu’on rétrofite aujourd’hui seront très recherchées dans quarante ans car elles auront, outre leur côté rétro, toutes les fonctionnalités du moment. Dans le futur, pourquoi ne pas imaginer qu’on leur ajoutera aussi la conduite autonome ?

« Dans le futur, pourquoi ne pas imaginer qu’on leur ajoutera aussi la conduite autonome ? » ©Transition one
« Dans le futur, pourquoi ne pas imaginer qu’on leur ajoutera aussi la conduite autonome ? » ©Transition one

La logique du monde de l’automobile n’est-elle pas plutôt de faire disparaître les anciens modèles au profit des nouveaux ?

C’est pourquoi nous ne sommes pas une solution du monde de l’automobile. Nous proposons de rompre avec ce modèle et de regarder les choses sur la durée : si on amortit la quantité de CO2 liée à la production d’un véhicule sur un temps de vie beaucoup plus long, l’impact écologique est nettement moindre. Or, encore une fois, les véhicules électrifiés sont appelés à rouler très longtemps sans polluer l’atmosphère. Cette disruption est d’autant plus vertueuse que le rétrofit d’une voiture est bien plus économe en CO2 que la fabrication d’un véhicule neuf.

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Par exemple ?

La fabrication de petites voitures électriques, style Renault Zoe, implique la production de sept tonnes de CO2. Le rétrofit d'un véhicule léger est de l'ordre de deux ou trois tonnes. Là encore, la logique du rétrofit industriel s'inscrit à contre-courant de la vision développée par le monde automobile. Les constructeurs, obligés par les circonstances, poussés dans le dos par les décideurs politiques, développent leurs gammes électriques. Et ils le font en étant à l'écoute de leurs clients, qui réclament des véhicules à l'autonomie proche de celles des voitures thermiques. Pour y arriver, ils doivent augmenter la quantité de batteries, ce qui rehausse le poids du véhicule, qui devient dès lors plus énergivore. Difficile de trouver le bon équilibre sans faire gonfler la facture et les émissions de carbone liées à la production d'un véhicule pourtant réputé propre. Comme les voitures personnalisées du début du XXe siècle, les coûteux nouveaux véhicules électriques ne sont dès lors accessibles qu'à un segment de la population. En vous expliquant cela, je pense à nouveau à Henry Ford. Il disait : « Si j'avais demandé aux gens ce qu'ils voulaient, ils m'auraient répondu : "Des chevaux plus rapides." » Alors que nous sommes confrontés à l'urgence climatique, la question de l'autonomie doit être abordée autrement. Oserais-je dire encore, de manière disruptive.

Quelle autonomie auront les voitures que vous projetez d’électrifier en série ?

Elles auront 100 kilomètres d’autonomie réelle et pourront rouler à une vitesse maximale de 100-110 km/heure.

N’est-ce pas trop peu ?

En réalité, ce ne l’est pas du tout pour une majorité de conducteurs qui, je le répète, ne font guère plus de 30 kilomètres par jour dans le cadre de leurs déplacements domicile-travail. De plus, ils sont tenus, dans les zones urbaines et sur les périphériques, de respecter des limites de vitesse de plus en plus contraignantes. Enfin, il faut imaginer ces véhicules à autonomie limitée dans un monde différent de celui que nous avons connu, dans un écosystème qui, d’ailleurs, change déjà sous nos yeux. Les points de recharge sont de plus en plus nombreux : sur les parkings des entreprises, des magasins et, en somme, de tous les lieux collectifs. Bien sûr, cette solution ne convient pas pour des personnes qui doivent rouler 200 kilomètres par jour pour des raisons professionnelles. Mais celles-là ont les moyens d’investir dans les voitures à grande autonomie proposées par les constructeurs.

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La nécessité de déplacements plus longs peut se présenter à tout un chacun, que ce soit pour visiter la famille, partir en vacances…

L’équation est la suivante : je peux rouler 90 % du temps avec une voiture « rétrofitée » qui coûte beaucoup moins cher, financièrement et écologiquement, qu’une électrique neuve. Pour les 10 % de déplacements plus longs, dois-je impérativement investir dans un véhicule très onéreux qui offre 400 ou 500 kilomètres d’autonomie ? Dois-je le faire alors que le monde change ? Les applications de voitures partagées se multiplient. En deux clics, vous pouvez réserver un véhicule qui dispose d’une plus grande autonomie. Vous allez le chercher et vous laissez votre auto personnelle en charge sur le parking du loueur. Et cela pourrait être encore plus facile. Des opérateurs commencent déjà à proposer que les véhicules loués soient livrés à domicile. En toute simplicité, on commandera bientôt une voiture de location comme une pizza. Avec cette autre manière de voir, l’autonomie importante du véhicule familial est plus un luxe qu’une nécessité.

Aymeric Libeau : « Il faut imaginer ces véhicules à autonomie limitée dans un monde différent de celui que nous avons connu, dans un écosystème qui, d’ailleurs, change déjà sous nos yeux.» ©Transition one
Aymeric Libeau : « Il faut imaginer ces véhicules à autonomie limitée dans un monde différent de celui que nous avons connu, dans un écosystème qui, d’ailleurs, change déjà sous nos yeux.» ©Transition one

De toute manière, la réalité à laquelle nous sommes confrontés, cette question climatique urgente, nous incite à changer de comportement.

Oui, et il ne faut pas y voir qu’un risque de perdre un certain confort. On peut anticiper avec enthousiasme ce monde nouveau qui se crée sous nos yeux. Il va susciter de nombreuses innovations dont il est difficile aujourd’hui d’imaginer toutes les conséquences. Par exemple, dans la Belgique ou la France des années 1970, personne n’aurait imaginé la disparition des cabines téléphoniques sans y voir la perte d’un confort. Aujourd’hui, les jeunes générations, adeptes du smartphone, savent-elles seulement que ces cabines téléphoniques ont autrefois existé ?

« Il y a une prise de conscience des enjeux en Belgique, mais je doute qu’elle soit suffisante »

En France, l’industrie naissante du rétrofit bénéficie-t-elle du soutien des décideurs politiques ?

La réponse est clairement positive. En 2020, la réglementation qui imposait l’autorisation des constructeurs pour transformer les véhicules a été abrogée. Après un rétrofit, l’homologation est donc devenue plus aisée. À cela s’ajoute la prime gouvernementale offerte aux particuliers qui veulent procéder à une électrification de leur véhicule thermique. Et ce n’est pas tout : pour soutenir l’industrialisation de la filière, le gouvernement a lancé un appel à projets. Il est déjà acquis que des dizaines de millions d’euros de subventions publiques accompagneront les investissements privés dans ce chantier émergent de la transition écologique.

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En Belgique aussi, il y a une avancée : un arrêté royal est en cours d’élaboration, qui devrait assouplir les conditions d’homologation des véhicules ayant fait l’objet d’un rétrofit. Cela va donc dans le bon sens ?

Il y a une prise de conscience des enjeux en Belgique, mais je doute qu’elle soit suffisante. C’est le sentiment que j’ai eu lorsque je me suis déplacé dans votre pays pour discuter avec des parlementaires wallons. C’est aussi celui que j’ai en voyant les évolutions législatives qui sont envisagées. Puisque j’ai des ambitions de développement au niveau européen, j’ai essayé d’entrer en contact direct avec votre ministre de la Mobilité. Malheureusement, je n’ai pu susciter son intérêt. Il me semble que les décideurs politiques belges soutiennent plus une vision « artisanale » du rétrofit, cette logique des petits ateliers que j’évoquais précédemment. Cette partie de l’activité a évidemment sa raison d’être : elle offre à un certain public la possibilité de transformer des véhicules thermiques, souvent des « ancêtres » comme vous dites en Belgique, en y mettant le prix. Le but est alors de se faire plaisir, voire de préserver un patrimoine automobile, mais l’impact est quasi nul en termes environnementaux. Alors que les zones de basses émissions se multiplient, on peut supposer que certains auront le besoin et les moyens d’investir dans un rétrofit artisanal de leur véhicule utilitaire. Souvent, ces derniers sont personnalisés en fonction du métier et une transformation, même si elle est un peu coûteuse, reste plus intéressante que l’achat d’un véhicule neuf.

Mais il y a aussi les voitures légères des particuliers qui seraient intéressés par un rétrofit.

Voilà ! À cet égard, la solution passe par une filière industrielle, le volume permettant de diminuer les coûts. La Belgique devrait y réfléchir, il y a une opportunité à saisir. La Commission européenne ne cesse d’évoquer son « green deal ». L’an dernier, lorsqu’ils ont voté l’interdiction des véhicules thermiques neufs en 2035, les parlementaires européens ont aussi validé un amendement n°54, qui demande une harmonisation de la réglementation du rétrofit dans l’Union. Un marché énorme va s’ouvrir pour l’électrification des véhicules particuliers et seule une vision industrielle pourra y répondre. Plus que de permettre l’accès à la voiture électrique à un plus grand nombre de personnes, l’enjeu est, je le souligne encore, d’épargner beaucoup de tonnes de CO2.

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