#MaJupeMonDroit : À Madagascar, les femmes se lèvent contre les remarques sexistes du ministère de l'Éducation
À Madagascar, les recommandations du ministère de l’Éducation sur le port de la jupe ont déclenché une vague de protestations sur les réseaux sociaux. Rassemblées sous le hashtag #MaJupeMonDroit, les Malgaches s’indignent des conseils qui leur sont donnés pour ne pas se faire agresser sexuellement par des hommes.
- Publié le 16-04-2019 à 15h42
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Dans une société où l’on apprend à ne pas se faire violer, plutôt qu’à ne pas violer, le ministère malgache de l’Éducation a récemment conseillé aux femmes d’éviter les tenues légères pour ne pas se faire agresser. Ce discours est tristement connu des victimes de viol. Après avoir vécu un tel traumatisme, elles peuvent parfois ressentir également un sentiment de culpabilité imposée vicieusement par une seule question : «Qu’est-ce que vous portiez à ce moment-là ?» Si le viol n’est en aucun cas la faute de la victime, les dernières recommandations du ministère vont encore dans ce sens.
« Les vêtements sages que portent les jeunes filles diminuent les besoins diaboliques des hommes qui aiment les violenter. Il est donc du devoir des parents de mettre leurs filles sur le droit chemin pour les éloigner des vêtements qui attirent », a-t-il écrit dans une publication sur Facebook, repérée par RFI et accompagnée par une image d'une femme en mini-jupe et décolleté plongeant.Supprimée entre-temps, cette publication a déclenché une vague d'indignation dans le pays. Et pour cause, elle présente une nouvelle fois les femmes comme des aguicheuses provocatrices, suppose que les victimes d'agressions sexuelles ont une part de responsabilité dans les violences qu'elles subissent et remet sur la table le mythe des pulsions sexuelles incontrôlables des hommes.
Mon corps, mon choix
Face à ces recommandations sexistes, de nombreuses femmes ont décidé de réagir, en publiant notamment une photo d’elle dévoilant leurs jambes avec le hashtag #MaJupeMonDroit. Le mouvement a été lancé par Nifin’Akanga, une organisation qui lutte pour la dépénalisation de l’avortement à Madagascar. Le 11 avril, elle a lancé un appel aux femmes de participer au «jupe challenge». Elles sont des centaines à y avoir répondu.
«Ne me dites pas comment m'habiller, dites-leur de ne pas violer.Ce que je porte ne vous regarde pas. Arrêtez de défendre la mauvaise mentalité. Le viol n'est JAMAIS la faute de la victime», a écrit une jeune Malgache sur Instagram. «Continuons à sortir nos plus belles jupes/robes les filles, il n'est plus admissible qu'en 2019 un pays nous dicte un code vestimentaire», lance une autre.
« La culpabilisation est viscéralement inscrite dans la société où le problème est déplacé sur la longueur de la jupe et non l'éducation et la responsabilité des harceleurs. […] Il est du devoir des parents d'éduquer leurs fils à comprendre que la femme n'est pas du bétail, […] que les vêtements que porte une femme ne sont point une incitation au viol », a suggéréMbolatiana Raveloarimisa, l'activiste des droits humains,dans L'Express de Madagascar samedi.
Dimanche 14 avril, le ministère de l'Éducation a tenté de faire taire la polémique en présentant ses excuses. «Face à la publication d'un message controversé (…), le Ministère tient à présenter ses excuses et condamne fermement la diffusion d'une telle image à caractère maladroit et choquant de ce message», commence le communiqué. «Rien ne peut justifierles agressions sexuelles envers les femmes, encore moins leurs tenues vestimentaires». Le Ministère ajoute qu'une sanction a été prise à l'encontre de l'auteur de la publication et qu'une restructuration de l'office fut «immédiate».