"Dear catcallers" : Elle pose avec ses harceleurs pour dénoncer la récurrence des agressions

Une jeune néerlandaise a posté durant un mois des selfies avec ses harceleurs de rue pour conscientiser à la problématique urbaine.Mais réagir n’est pas à la portée de toutes – et c’est bien normal.

Elisabeth Debourse
Noa Jansma a posé durant tout un mois avec ses harceleurs.
Noa Jansma a posé durant tout un mois avec ses harceleurs.

«Cher harceleur, ceci n'est pas un compliment », commenceNoa Jansma dans un post Instagram, le premier d'une – trop – longue série. «Puisque de nombreuses personnes ignorent la récurrence et le contexte du harcèlement de rue, je montrerai mes catcallers durant un mois », expliquait-elle le 29 août. Et la jeune femme néerlandaise a tenu parole, avec pas moins de 24 clichés publiés en septembre – soit près d'un par jour. Chaque «photo-souvenir»possède les mêmes caractéristiques : à l'avant-plan, Noa arbore une expression neutre, tandis que derrière elle se tient celui qui l'a apostrophée simplement parce qu'elle était une femme qui avait eu l'audace de marcher en rue.

guillement

Je voulais faire quelque chose qui me donne du pouvoir sur eux.

24 000 abonnés plus tard, elle explique au site Het Parool : «Quand j'ai demandé à un homme de venir faire une photo avec moi, il a répondu avec enthousiasme (…)Ils ne sont pas du tout méfiants parce qu'ils trouvent que ce qu'ils font est tout à fait normal», exposant ainsi en quelques phrase les dessous d'une problématique qui relève tant de l'éducation familiale que sociétale. Elle accompagne chaque cliché des commentaires qui accompagnaient ses rencontres, du simple «hé bébé »à «je sais ce que je veux faireavec toi ».

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Une démarche pas si évidente

«Je pourrais continuer à l'infini. Mais je ne veux pas», posait l'instigatrice du projet, qui habite à Amsterdam bien qu'une grande partie de simages aient été prises à Barcelone, à a fin du mois. À la place, elle propose de donner accès au compte à une harcelée vivant dans une autre ville, afin de dénoncer le côté systémique du problème. «Je vous rappelle qu'il est toujours possible de poster votre propre photo #dearcatcallers«, ajoute-t-elle.

Au Pays-Bas comme en Belgique, le harcèlement de rue est puni par la loi – pour autant qu'on puisse prouver que l'incident ait eu lieu. Pour le coup, Noa Jansma a au moins 24 intéressés à faire verbaliser. «J'ai besoin de ces photos, mais ça ne rend pas l'expérience plus agréable«, exprime-t-elle cependant. Durant ce mois de septembre, elle a parfois fui ces hommes, effrayée, quand sa demande n'était pas tout simplement déboutée.

Et les réticences de la Néerlandaise exposent les deux principaux obstacles à ces initiatives de loi pour défendre les femmes dans l'espace public : dans un premier temps, la démarche n'est pas évidente et masque la crainte, la sensibilité et la fatigue mentale qui frappentde nombreuses femmes dans la majorité des cas de harcèlement de rue. Toutes ne peuvent pas, dans toutes les situations, faire face à leur agresseur : certains évènements se produisent en une fraction de seconde, tandis que d'autres font miroiter le danger d'une agression physique, au-delà du verbe salace. Parfois, les femmes sont simplement fatiguées ou blasées par ces «incidents» qui se répètent au quotidien. «Je n'ai jamais su répondre aux catcallers«, avoue elle-même Noa Jansma à Het Parool.

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Et siporter plainte nécessite déjà dans un premier temps de confronter son agresseur, encore faut-il obtenir des informations de sa part pour l’identifier auprès des autorités. Rien de plus simple dans la rue, face à un homme qui vient de vous envoyer à la figure une «dick pic» verbale et non-solicitée, pas vrai ?

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