Glyphosate au petit-déj : une étude qui "contribue à nourrir un climat anxiogène chez le consommateur"
Alors qu’une étude révèle que du glyphosate se trouve dans ceque l’on avale du petit-déjeuner jusqu’au dîner, d’aucuns s’affolent devant leur bol de cornflakes tandisque d’autres dénoncent une psychose délibérément alimentée.
- Publié le 15-09-2017 à 13h39
- Mis à jour le 15-09-2017 à 15h05
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Il se trouverait dans un peu plus de la moitié des produits de notre alimentation courante. Dans un spaghettis bolo, un houmous fait-maison ou un bol de muesli.
C'est l'ONG Générations Futures qui tire la sonnette d'alarme avecsa nouvelleétude. L'association française de défense de l'environnement a analysé trente échantillons de produits alimentaires, 18à base de céréales et 12de légumineuses sèches, achetés en supermarché. Et le résultat fait froid dans le dos.
Du pesticide au petit-déj
Au total,seize des échantillons analysés contenaient du glyphosate, soit plus de la moitié.Sept céréales de petit-déjeuner sur huit, sept légumineuses sur douze et deux pâtes alimentaires sur sept. L’information sonne comme une bombe,surtout quand on sait que parmiles produits testésse trouvent les céréales préférées de nos chèrestêtes blondes.Nestlé, Kellogs, Weetabix,Jordans et Granola figurent notamment sur la liste des contaminés.
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Du pesticide au petit-déj ? La question n'aura pas mis longtemps à frapperles esprits tout en relançant le débat houleux autour des pesticides.«Le glyphosate : un cancérogène que vous avalez dès le petit-déjeuner», lit-on dans la presse, quelques heures après la publication de l'étude. Ni une ni deux, le glyphosate devient«l'ennemi du petit-déjeuner«.

Du glyphosateà tout bout de champ
Pourtant, on le retrouverait partout ailleurs. Et pas que dans l'alimentation. Rien d'étonnant, pour un produit massivement répanduà travers le monde et considérécomme l'herbicide le plus utiliséde toute l'histoire de l'agriculture. «Aujourd'hui, il est tout simplement impossible d'échapper au glyphosate», estime Greenpeace. Présente dans de nombreux pesticides, comme le célèbre Roundup, le glyphosate se répand depuis 1974 sur nos cultures. Au Royaume-Uni, en Allemagne, aux États-Unis comme en Argentine, des traces du produitont ainsi été retrouvées notamment dans du pain, de la bière, du vin et même dans des serviettes hygiéniques, souligne l'ONG.
Ce n'est pas du tout une bonne nouvelle pour la santé humaine.
Pour justifier ses recherches, l'organisation Générations Futures rappelle que «le glyphosate est très rarement analysé dans les aliments alors que l'ensemble de la population semble y être exposée». Au vu des résultats,« il y a donc urgence pour l'Union européenne de renoncer à l'usage de cette molécule classée cancérogène probable par le CIRC et de faire évoluer en profondeur son modèle agricole devenu trop dépendant des pesticides de synthèse»,déclare l'ONG.
Mais à l’heure où la dangerosité du glyphosate suscite toujours autant de controverses, certains dénoncent une volonté quasi orchestréed’alimenter lapsychose chez le consommateur.

«Nourrir un climat anxiogène»
Si le glyphosate est une nouvelle fois dans le viseur des associations environnementales, c'est qu'il s'inscrit dans «uncombat général bien plus vaste contre les pesticides», estime l'Afsca. Même à des doses infimes, sa simple présence suffit comme prétexte pour donner une nouvelle fois un coup de pied dans la fourmilière et faire trembler les géants de l'agro-business.
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Selon l'étude, aucun échantillon ne dépasseles seuils fixés par la réglementation européenne. «Alors que les résultats de cette enquête sont présentés comme alarmants, la lecture de ces données témoigne au contraire d'une situation tout à fait conforme à la réglementation visant à assurer la sécurité du consommateur», déclarela Plateforme Glyphosate Francepour qui l'ONG Générations Futures «contribue une fois de plus à nourrir un climat anxiogène chez le consommateur». Selon la Plateforme, les doses analyséessont près de250 fois inférieures aux limites prévues par la réglementation sanitaire, avec une concentration de 40 µg/kg pour une limite fixée à 10mg/kg. «Or c'est bien la dose qui permet d'évaluer un risque éventuel pour le consommateur et non la présence d'une substanceper se, si minime soit-elle», poursuit-elle.
Quel danger ?
En mars 2015, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé le glyphosate comme une substance cancérogène «probable chez l’homme», malgré des «preuves limitées». Six mois plus tard, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) a quant à elle jugé ce risque cancérogène «improbable». Plus récemment, l’Agence Européenne des produits chimiques (ECHA) tire à son tour la même conclusion.Leglyphosate ne serait pas cancérigène. Mais la question continue de diviserl’Europe et la communauté scientifique.
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À l’heure actuelle, l’Organisation mondiale pour la santé (OMS) et le CIRC semblent s’être mis d’accord sur le fait qu’il soit «peu probable» que le glyphosate provoque un risque cancérogène, sauf dans des cas de «forte exposition». Dans son rapport, l’ONG Générations Futures elle-même se garde bien de tirer des conclusions précises sur le risque sanitaire. Sans dépassement des limites maximales en résidus, difficile en effet de parler d’un réel danger.
«Évidemment, il n'y a pas de risque d'intoxication aiguë, mais on sait qu'être exposé à un produit cancérogène à côté d'autres, dans d'autres secteurs de l'environnement, pendant des années et des années, ce n'est pas du tout une bonne nouvelle pour la santé humaine», ajoute François Veillerette, directeur de Générations Futurespour quila dangerosité du glyphosate à grande échelle est encore largement méconnue.