"Catastrophe écologique": La rupture du barrage de Kakhovka en Ukraine aura des conséquences graves

Dans la nuit de lundi à mardi, 16 vannes, une écluse et plusieurs bâtiments avaient été détruits.

Invasion de l'Ukraine - Le barrage de Kakhovka endommagé, risque important d'inondations
Le barrage de Kakhovka. ©BELGA

Avec Belga.

La destruction partielle du barrage hydroélectrique de Kakhovka, actuellement occupé par les forces russes dans le sud de l’Ukraine, va entraîner “la plus grande catastrophe écologique en Europe depuis des décennies”, a déploré mardi Mykhailo Podolyak, le conseiller principal du président Volodymyr Zelensky, sur Twitter. Les inondations provoquées par les digues éventrées risquent de détruire “des milliers d’animaux et d’écosystèmes […] dans les prochaines heures”.

Des vidéos montrant des animaux, notamment des castors, dans des milieux urbains envahis par les eaux, ont commencé à déferler sur les réseaux sociaux. En outre, “150 tonnes d’huile moteur” se sont déversées mardi dans le fleuve Dniepr à la suite de la destruction du barrage, selon des responsables ukrainiens. “Il existe également un risque de nouvelles fuites d’huile, ce qui a un impact négatif sur l’environnement”, a fustigé sur Telegram Daria Zarivna, conseillère presse du chef de l’administration présidentielle ukrainienne, Andriï Iermak.

La centrale hydroélectrique de Kakhovka et le barrage – donc le niveau du réservoir – sont aux mains des Russes, tandis que la capitale régionale Kherson est repassée sous contrôle ukrainien en novembre, après huit mois d’occupation.

Nova Kakhovka partiellement inondée

Certaines parties de la ville ukrainienne de Nova Kakhovka, actuellement occupée par les forces russes, ont été inondées en raison de la destruction du barrage situé à proximité, a déclaré un responsable de l’occupation russe à l’agence de presse Tass. Selon l’agence russe, le niveau de l’eau à Nova Kakhovka est déjà supérieur à 10 mètres de haut. “Une grande partie de la ville a été inondée”, affirme-t-elle. Les autorités d’occupation installées sur place par Moscou ont indiqué avoir commencé l’évacuation des habitants de trois localités.

L’Ukraine, de son côté, a annoncé que “plus de 40.000 personnes risquent d’être en zones inondées.” “Les autorités ukrainiennes évacuent plus de 17.000 personnes. Malheureusement, plus de 25.000 civils se trouvent sur le territoire sous contrôle russe”, a indiqué sur Twitter le procureur général ukrainien Andriï Kostine.

A local resident walks along a flooded street in Kherson, Ukraine, Tuesday, Jun 6, 2023 after the Kakhovka dam was blown up overnight. The wall of a major dam in a part of southern Ukraine has collapsed, triggering floods, endangering Europe's largest nuclear power plant and threatening drinking water supplies. (AP Photo/Nina Lyashonok)
Un habitant marche le long d'une rue inondée à Kherson, en Ukraine, mardi 6 juin 2023, après l'effondrement du barrage de Kakhovka pendant la nuit. ©Copyright 2023 The Associated Press. All rights reserved.
Red Cross workers drive along a street in Kherson, Ukraine, Tuesday, Jun 6, 2023 which was flooded after the Kakhovka dam was blown up overnight. The wall of a major dam in a part of southern Ukraine has collapsed, triggering floods, endangering Europe's largest nuclear power plant and threatening drinking water supplies. (AP Photo/Evgeniy Maloletka)
Des employés de la Croix-Rouge ont été mobilisés. ©Copyright 2023 The Associated Press. All rights reserved.

Le niveau d’eau du réservoir du barrage de la centrale hydroélectrique de Kakhovka baisse de 16 centimètres toutes les heures, a indiqué Ukrgidroenergo, l’exploitant de la centrale, dans un communiqué mardi matin. Ihor Syrota, directeur général d’Ukrgidroenergo, a déclaré que la centrale hydroélectrique était irréparable.

La centrale nucléaire de Zaporija, située à 150 kilomètres en amont du barrage hydroélectrique, et qui reçoit de l’eau de son réservoir pour refroidir ses réacteurs, ne serait pas non plus en danger direct, selon l’Agence internationale pour l’énergie atomique (AIEA).

Kiev et Moscou se rejettent la faute

La Russie, comme l’Ukraine, a demandé une réunion urgente du Conseil de sécurité des Nations unies, ont confirmé les Émirats arabes unis, qui président le Conseil de sécurité ce mois-ci. Depuis New York, l’ambassadeur russe auprès des Nations unies a d’ores et déjà fait savoir que la Russie n’avait rien à voir avec la destruction partielle du barrage de Kakhovka. “Qu’est-ce qui ne va pas avec la santé mentale de ceux qui disent de telles choses ?”, s’est demandé Vassili Nebenzia. Les deux parties belligérantes se sont rejeté la faute de l’écroulement et des conséquences profondes que cela entraîne pour le conflit armé, les civils et l’environnement dans la région.

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Cette destruction représente des avantages et des désavantages autant pour les Russes que pour les Ukrainiens.

Je suis de plus en plus convaincu que ni les Ukrainiens ni les Russes n’ont fait sauter le barrage de Nova Kakhovka, mais qu’il s’est effondré en raison de bombardements antérieurs et de l’usure du temps”, affirme Tom Simoens, historien à l’Ecole royale militaire (ERM). “Cette destruction représente des avantages et des désavantages autant pour les Russes que pour les Ukrainiens.” D’après l’historien, si la Russie était coupable de la destruction de la centrale hydraulique, elle aurait délibérément inondé une zone importante de l’Ukraine afin de rendre plus difficile toute avancée vers Kherson. “Mais aujourd’hui, certaines de ses propres positions sont également sous l’eau”, poursuit-il.

Pour l’Ukraine, un avantage pourrait être qu’une partie du terrain en amont du barrage devienne plus sèche et que des opérations militaires puissent alors être menées plus facilement. “Les inondations actuelles représentent toutefois une catastrophe pour tous ceux qui vivent en aval”, souligne Tom Simoens.

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Le barrage était déjà soumis à l’usure après que les Russes en aient fait sauter une partie en novembre 2022”, nuance l’historien. “Comme il se situe entre les territoires occupés par les forces russes et le reste de l’Ukraine, il n’était plus entretenu. De plus, le niveau d’eau dans le lac était extrêmement élevé, ce qui créait une forte pression sur le barrage. En temps de paix, il aurait été capable de faire face à cette situation, mais pas en étant endommagé.” À ce jour, le responsable de la rupture du barrage de Kakhovka n’est pas connu.

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